Lisbonne, 27/01/2012
La version prononcée fait foi
Caras Amigas, Caros amigos e camaradas.
Je suis très heureuse de m'adresser au congrès de la CGTP au nom de la confédération européenne des syndicats.
J'ai été élue Secrétaire générale de la confédération au dernier congrès de la CES. J'ai été élue avec votre soutien. Et je vous en remercie. Je suis la première femme dans cette position. Il n'y a aucun doute, les syndicats progressent sur la voie de l'égalité.
La Confédération européenne des syndicats est le syndicat européen.
C'est le syndicat européen dont la CGTP fait pleinement partie depuis de nombreuses années, avec 86 autres confédérations nationales et 12 fédérations sectorielles.
Le syndicat européen est fier de compter la CGTP parmi ses membres de longue date. Vous contribuez, par vos positionnements à donner du caractère et de la vigueur à nos prises de position et à nos actions.
Soyez-en, ici, remerciés.
La confédération européenne des syndicats est pluraliste et démocratique. Le syndicat européen n'est le prisonnier d'aucune institution, il est uni, fort, solidaire et indépendant.
Le syndicat européen, je vous le dis d'emblée et très clairement, est solidaire du peuple, des travailleurs portugais et de leurs syndicats. Vous êtres pris dans une tourmente financière, économique et sociale particulièrement violente. Dans cette tourmente nous sommes avec vous.
De cette crise nous devons sortir! Nous devons indiquer la voie de l'espoir, la voie vers la justice, la voie vers l'égalité.
Cette voie-là n'est pas celle qui nous est, qui vous est imposée aujourd'hui.
La solution qui semble faire l'unanimité politique en Europe est la solution de l'austérité. Couper dans les salaires, dans la protection sociale, attaquer les mécanismes de négociation, hyper flexibiliser les contrats de travail, voilà ce que les idéologues néo-libéraux proposent comme solution!
Cette solution, nous le savons et nous le constatons, cette solution ne marche pas et ne marchera pas. La Grèce, soumise à un régime drastique, s'enfonce plus avant dans la crise.
La solution de l'austérité ne marche et ne marchera pas parce qu'elle étouffe la croissance et barre la route à la création d'emploi.
De plus en plus de voix s'élèvent pour dire que l'austérité n'est pas la voie vers une sortie de crise. L'OCDE, l'OIT, et même une trop célèbre agence de notation disent que l'austérité sans croissance est une dangereuse impasse. Quand nos politiciens comprendront-ils enfin ce message?
Au Portugal les inégalités sont énormes, beaucoup plus importantes que dans d'autres pays européens. Au Portugal le taux de chômage est très élevé, les retraités voient leur revenu baisser, et les jeunes qui ne voient pas d'issue, veulent quitter le pays. Le Portugal est sous la pression et sous la dépendance de la troïka, et les travailleurs et leurs familles doivent subir les conséquences directes de leur diktat.
La réponse des dirigeants européens dans ces circonstances graves, quelle est-elle? Et bien leur réponse est une fuite en avant: ils élaborent un nouveau traité qui, s'il est adopté, obligera les pays signataires à être prisonniers d'un corset budgétaire étouffant.
Bref, on veut inscrire dans le marbre des règles de gestion financière qui devraient rester souples pour pouvoir s'adapter aux circonstances nationales et qui devraient aussi favoriser l'emploi. Nous savons, bien sûr qu'il faut revenir à un équilibre budgétaire soutenable. Mais avec la route de l'austérité on accroîtra la récession. On ne consolidera pas les budgets. La confiance ne reviendra pas.
Un traité est un événement important. Le processus suivi pour arriver au texte qui sera vraisemblablement finalisé lundi prochain n'est pas démocratique. Le parlement européen n'a pas pu jouer un rôle actif. Nous, syndicats européens, voulons une Europe sociale et démocratique. Et pas l'Europe budgétaire, financière et technocratique qu'on nous présente.
Lors de son comité de direction qui s'est réuni il y a deux jours, le 25 janvier, le syndicat européen a déclaré son opposition à ce traité. Nous avons expliqué nos raisons, nous avons proposé nos solutions.
De plus nous avons décidé que le 29 février serait une journée d'action européenne, organisée dans chaque pays, mais sous un même mot d'ordre: trop c'est trop! Non à l'austérité, oui à l'Europe sociale.
J'espère vivement que la CGTP nous rejoindra, fera cause commune avec les syndicats européens le 29 février prochain.
Alors, camarades et chers amis, quelle est la solution pour sortir de l'impasse, quelle est la solution pour voir de la lumière au bout du tunnel?
La solution elle est dans une intervention massive de la banque centrale européenne, dans la mutualisation partielle de la dette, dans la taxe sur les transactions financière, dans la fin de l'évasion fiscale et dans une fiscalité juste.
La solution elle n'est pas dans moins d'Europe, mais dans une Europe économiquement et politiquement responsable et solidaire qui promeuve la démocratie sociale, la négociation collective, la protection sociale et les services publics.
Le repli national et frileux n'est pas une solution aux problèmes existentiels qui sont ceux des pays de l'Union européenne. Dans le monde globalisé qui est le nôtre, l' Europe est, potentiellement, une solution plus qu'un problème.
Un repli national, voire nationaliste, serait une impasse, il n'offrirait pas plus d'emploi. Au contraire il augmenterait le chômage. Les hommes et les femmes d'aujourd'hui, les travailleurs et travailleuses, les jeunes en particulier ont le droit de vivre dans un espace européen ouvert et couvert par des règles sociales. Il nous faut ouvrir ces portes-là.
Nous combattrons sans faillir les dérives nationalistes, racistes et xénophobes qui profitent de la tourmente actuelle pour grossir les rangs des partis d'extrême droite.
Le syndicat européen a des valeurs gravées dans le marbre: hommes et femmes nous sommes tous égaux en droit, quelles que soient les différences physiques ou culturelles de tous ordres qui peuvent exister entre nous.
Je ne vous le cache pas, je suis très inquiète devant la montée en puissance du nationalisme en Europe. La dérive en Hongrie est particulièrement alarmante.
Non au racisme, non à la xénophobie, oui au progrès et à la justice sociale.
Président, camarades, le rôle du syndicat est un rôle de critique, voire d'opposition, mais aussi de négociation et de proposition.
Et des propositions, nous en avons:
Nous voulons des investissements pour une économie soutenable, une économie verte. Des investissements dans le domaine des transports et de l'énergie entre autres.
Nous voulons une politique industrielle européenne qui investisse dans les secteurs de pointe et d'avenir, comme les technologies de l'information et le numérique.
Nous voulons des réponses pour revenir à un équilibre budgétaire sur le long terme.
Nous voulons des politiques actives du marché du travail, la formation tout au long de la vie.
Nous voulons une Europe qui promeuve le modèle social européen fait de relations sociales, de protection sociale et de services publics.
Bref, nous voulons que l'Europe signe un contrat social et pas seulement un pacte budgétaire.
Devant le rouleau compresseur de la gouvernance économique qui est en place, le syndicat européen se mobilise pour contrer les politiques néfastes, mais aussi pour, ensemble, chercher les meilleures solutions pour limiter les dégâts.
Dans quelques jours les dirigeants syndicaux se réunissent à Copenhague pour réfléchir à une palette de solutions possibles. Je compte bien sur la participation de la CGTP.
Avant de terminer mon intervention je voudrais adresser ici un mot tout particulier à Manuel.
Manuel, tu quittes tes fonctions de secrétaire général de la CGTP.
Tu as, avec une conviction sans faille, mené un combat syndical et social tout au long de ta vie. Tu l'as fait malgré les difficultés, malgré les cahots du chemin. Tu as bien vu que la voie de l'avenir était la voie de la solidarité y compris au niveau européen. Tu as garanti la participation active de ton organisation au sein du syndicat européen.
Au nom de la Confédération européenne des syndicats, je t'adresse des remerciements sincères, et appuyés.
Je te dis le respect que nous te portons tous pour tes convictions ton engagement et ton travail. Je te dis notre respect, mais aussi notre amitié. Je te souhaite de beaux jours, peut être un peu moins de stress, mais certainement plein d'énergie et de fraternité.
A vous tous et toutes je souhaite de continuer la lutte pour la justice sociale dans votre pays mais aussi avec toutes ceux et celles qui, dans le syndicat européen poursuivent le même but. J'espère que nous pourrons continuer à compter sur vous et avec vous à l'avenir.
Je souhaite un bon congrès et un bel avenir à la CGTP.