Bruxelles, 05-06/06/2012
{{Introduction
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Le Paquet pour l’emploi[[Le Paquet pour l’emploi se compose de la communication Vers une reprise génératrice d’emplois (« la Communication ») et de neuf documents de travail des services (de la Commission), http://ec.europa.eu/commission_2010-2014/andor/headlines/news/2012/04/20120418_fr.htm]], publié le 18 avril 2012, est la réponse de la Commission face à la persistance d’un niveau de chômage élevé en Europe. Il présente un plan d’action à moyen terme pour l’Union européenne et les États membres pour soutenir une « relance riche en emplois » et atteindre les objectifs de la Stratégie Europe 2020. La Commission a raison de se concentrer sur ce redoutable défi et semble commencer à tenir compte de l’incontestable réalité des chiffres du chômage toujours croissant et des médiocres perspectives économiques. Les commentaires de la CES qui suivent concernent principalement la Communication « Vers une reprise génératrice d’emplois » (« la Communication »).
La CES voit dans le Paquet pour l’emploi un certain nombre de développements allant dans le bon sens. Nous saluons en particulier la reconnaissance du fait que la nouvelle gouvernance économique de l’UE doit être coordonnée avec la politique de l’emploi et la politique sociale et que les partenaires sociaux doivent être plus étroitement associés à ce processus. Nous nous félicitons également de l’attention accordée aux questions suivantes : renforcement du dialogue social dans la gouvernance européenne ; encouragement de la demande de main-d’œuvre ; affronter le chômage chronique des jeunes ; s’attaquer à la segmentation du marché du travail ; identification des secteurs potentiellement créateurs d’emplois (économie verte, santé, TCI) ; investissement dans les travailleurs et les compétences et efforts renouvelés pour lever les obstacles à la libre circulation des travailleurs.
Face à un taux de chômage atteignant 11% dans la zone euro et plus de 10% dans le reste de l’Union européenne (et qui concerne plus de 25 millions de personnes), contenir et inverser cette crise de l’emploi dévastatrice est de la plus haute priorité pour la CES. Le Paquet pour l’emploi représente un pas dans la bonne direction mais la CES s’inquiète de ce que, si l’UE poursuit une politique collective d’austérité, de nombreuses propositions parmi les plus positives du paquet resteront seulement des propositions. Alors que la Commission souligne à juste titre que des politiques macroéconomiques, industrielles et d’innovation sont importantes pour la croissance de l’emploi, elle ne propose aucun programme d’investissement ni ne tient compte de l’impact des politiques commerciales. La CES insiste sur la cohérence nécessaire entre les politiques en matière d’emploi, d’investissement et de commerce extérieur. Les mesures d’accompagnement existantes, telles que le Fonds d’ajustement à la mondialisation, ne suffisent pas à atténuer les effets négatifs des accords de libre échange sur l’emploi dans certains secteurs. La CES s’interroge sur la capacité à produire la relance riche en emplois souhaitée sans un changement d’orientation de la politique de l’UE. Les politiques du marché du travail ne compenseront pas les erreurs des politiques macroéconomiques et le Paquet pour l’emploi ne fonctionnera pas dans le vide et ni ne pourra pas, à lui seul, créer les conditions nécessaires pour favoriser la création d’emplois.
L’austérité a un impact négatif sur l’emploi, tant dans le secteur public que privé. Elle augmente davantage encore les inégalités et la pauvreté. Quatre-vingts pourcent des Européens pensent que la pauvreté a augmenté dans leur pays au cours de l’année écoulée et seulement 14% espèrent voir une amélioration de la situation financière de leur foyer au cours de l’année à venir[[Sixième Flash Eurobaromètre, http://ec.europa.eu/public_opinion/flash/fl_338_en.pdf]]. En fin de compte, l’austérité met en péril toute relance potentielle. La CES a constamment soutenu que des alternatives existent et réitère donc son appel pour : le gel temporaire d’une nouvelle austérité budgétaire en 2012 (lié à un moratoire sur les suppressions d’emplois dans le secteur public pour protéger l’emploi dans l’UE) ; un Plan d’investissement européen axé sur les investissements structurels et soutenu par de nouvelles sources de financement y compris une taxe sur les transactions financières et des euro-obligations ; que la Banque centrale européenne agisse comme prêteur en dernier ressort[[Résolution de la CES – Investir pour la croissance et l’emploi – Réaction de la CES à l’Examen annuel de la croissance 2012, 6-7 mars 2012, http://www.etuc.org/a/9810
]].
Bien qu’il présente nombre de développements politiques positifs intéressants, la CES déplore l’importance excessive accordée, dans le Paquet pour l’emploi, aux mesures agissant sur l’offre. La flexibilité accrue du marché du travail au travers de la dérégulation de l’emploi reste l’objectif principal des réformes proposées. Il est également important de noter qu’une augmentation de la main-d’œuvre, alors qu’elle est déjà excédentaire du fait des niveaux actuels de chômage, entraînera à court terme un taux de chômage plus élevé encore.
{{Appui à la création d’emplois
Stimuler la demande de main-d’œuvre
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La Commission fait plusieurs suggestions visant à stimuler la demande de main-d’œuvre. La CES reconnaît que davantage d’efforts doivent être faits pour rendre les marchés du travail plus inclusifs et que des mesures spécifiques en faveur des groupes vulnérables sont nécessaires. La Communication identifie dans ce contexte le recours à des aides à l’embauche comme moyen d’atténuer les effets de la crise économique sur le chômage. La CES s’inquiète de ce que cela soit encouragé comme ou confondu avec une politique générale appropriée pour la création d’emplois durables de qualité. Les responsables politiques doivent éviter les incitations erronées qui pourraient encourager les employeurs à réduire la productivité, la formation et les salaires afin de s’assurer l’accès à de tels systèmes. Les effets pervers de systèmes par lesquels des travailleurs sont licenciés pour être immédiatement réembauchés afin de profiter d’une aide doivent également être pris en compte.
Tout en reconnaissant la compétence limitée de l’UE en matière de fiscalité, la CES convient que la politique fiscale a un rôle à jouer pour soutenir la création d’emplois et estime que l’accent doit être mis sur un transfert des charges fiscales du travail vers le capital. Nous constatons les progrès en matière d’assiette commune consolidée pour l’impôt sur les sociétés mais, faute d’un taux d’imposition commun, l’évolution à la baisse de l’impôt des sociétés encourage la concurrence fiscale et les délocalisations d’emplois négatives. Bien que la CES souscrive à une approche favorisant un glissement de l’imposition vers des impôts fonciers et assurant un contrôle adéquat de son impact redistributif, un changement en faveur de taxes à la consommation serait néfaste en ce qu’il ignore l’impact régressif de telles taxes sur la répartition des revenus. De même, suggérer qu’il faut diminuer les charges sociales de l’employeur est erroné et déséquilibré car ne tenant pas compte de l’impact que cela pourrait avoir sur l’affaiblissement des recettes des systèmes de sécurité sociale. Il faut au contraire encourager les États membres à renforcer ces systèmes qui constituent un élément fondamental du modèle social européen et sont les stabilisateurs automatiques qui ont prouvé leur efficacité au premier stade de la crise.
La CES a déjà réclamé davantage d’efforts pour lutter contre les causes du travail non déclaré et informel et salue donc l’attention accordée à cette question, y compris la proposition de lancer une consultation sur l’établissement, au niveau européen, d’une plateforme entre l’inspection du travail et les autres organes d’exécution. Un comité européen de hauts responsables de l’inspection du travail (CHRIT) existe déjà. La consultation devrait donc poser la question de savoir si une nouvelle plateforme est nécessaire plutôt que d’améliorer le fonctionnement du CHRIT en y ajoutant une structure formelle pour la participation des partenaires sociaux.
De plus, la CES pense que, dans le contexte d’un marché européen du travail en gestation, une perspective plus large est nécessaire qui englobe la protection des travailleurs, la conformité avec le droit du travail et les conventions collectives et qui, dans ce cadre, soit axé sur les groupes les plus vulnérables tels les migrants, les jeunes et autres travailleurs qui ont un emploi précaire. L’inspection du travail doit à tous égards disposer des ressources adéquates, en particulier en temps de crise et de l’augmentation de la charge de travail qui l’accompagne. En violation de la Convention 81 de l’OIT sur l’inspection du travail, il y a déjà un manque d’inspecteurs du travail dans un nombre significatif d’États membres alors que, dans certains pays, les mesures d’austérité ont conduit à une nouvelle diminution du nombre d’inspecteurs.
{{Salaires et création d’emplois
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Fixation des rémunérations : la CES se félicite du fait qu’en faisant référence à la concordance entre croissance réelle des salaires (et pas simplement la croissance des salaires ou des salaires nominaux) et évolution des gains de productivité, la Communication rejette implicitement la norme salariale du Pacte de compétitivité. Nous nous félicitons également que soit reconnu le besoin de stimuler la croissance salariale là où les salaires sont « sensiblement en retard » par rapport à ces gains. La CES rejette toutefois l’approche de la Commission selon laquelle les salaires sont considérés comme un instrument d’ajustement compétitif. Au lieu de cela, nous insistons pour que les salaires et les systèmes de formation des salaires aient un rôle plus important et des objectifs différents, notamment :
Garantir la sécurité en ne donnant pas aux employeurs le droit de diminuer les salaires (nominaux) ;
Éviter les tendances déflationnistes, ce qui implique qu’il faut éviter les réductions et le gel des salaires nominaux ;
Agir comme moteurs pour la demande et la croissance par des augmentations des salaires réels et une juste répartition des revenus entre capital et main-d’œuvre ;
Promouvoir la modernisation de l’économie : des systèmes de formation des salaires solides, plutôt que flexibles, représentent une forte motivation pour les employeurs pour rechercher des solutions fondées sur l’innovation et la modernisation au lieu d’avoir recours à une stratégie simpliste et insoutenable de réductions salariales.
Le fait que les salaires remplissent des objectifs divergents implique que le rôle d’un dialogue social autonome et le soutien de ce dialogue au travers de systèmes de négociations coordonnées sont essentiels. La CES attache la plus haute importance aux principes du Traité européen qui stipulent que l’UE doit scrupuleusement respecter les systèmes nationaux de relations du travail et n’a aucune compétence en matière de salaires.
L’augmentation du nombre de travailleurs pauvres est un phénomène auquel il faut remédier d’urgence. La CES soutient qu’un salaire décent, allant de pair avec des conditions de travail décentes, permettant aux gens de vivre et de travailler dans la dignité, est la « motivation » la plus efficace pour accepter un travail rémunérateur. Alors que des salaires minimum convenables peuvent contribuer à préserver de la pauvreté, nous rejetons ce que suggère la Communication, à savoir qu’un salaire minimum équivaut à un salaire décent. Selon la CES, un salaire décent plutôt qu’un salaire minimum est la mesure pour « garantir la qualité d’un emploi décent ». En outre, ce que la Commission appelle des salaires minimum suffisamment « ajustables » et « différenciés » n’est pas clair et peut être interprété d’une manière qui affaiblit le principe de base du salaire minimum, c’.-à-d. limiter la concurrence du marché qui pousse les travailleurs à se vendre moins cher en instaurant un salaire minimum. La CES ne soutiendra pas un ajustement à la baisse des salaires minimum en temps de crise alors qu’un salaire minimum strict est plus que jamais nécessaire comme le démontre notamment la situation en Grèce.
{{Potentiel de création d’emplois dans les secteurs clés
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Economie verte : la CES n’a cessé d’encourager la transition vers une économie efficace dans l’utilisation de l’énergie et des ressources et le développement d’emplois verts en réponse au défi environnemental qui représentent un élément clé d’un agenda alternatif à l’austérité visant à assurer une relance économique durable. Le Paquet pour l’emploi soulève à juste titre la question du potentiel de création d’emplois en abordant le changement climatique et nous approuvons la définition très large utilisée pour les « emplois verts ». Pour la CES, le changement vers une économie efficace en matière d’énergie et de ressources doit garantir une transition juste et nous regrettons que la Commission n’aborde pas cette dimension essentielle. Nous insistons sur la nécessité d’un dialogue social de haut niveau sur le climat et l’emploi. Des commentaires plus détaillés sont contenus dans la résolution de la CES sur la COP18 au Qatar[[Mettre en œuvre la transition juste en Europe et dans le monde : Position de la CES en vue de la COP 18 de Qatar, http://www.etuc.org/a/10042]].
Soins de santé et services sociaux : la Communication décrit bien les défis auxquels ces secteurs doivent faire face et qui devront être affrontés si l’on veut exploiter leur potentiel de création d’emplois et s’assurer que cela conduira à des emplois de qualité. La CES souligne que toute action politique dans ce domaine doit tenir compte du principe de base que les soins de santé et les services sociaux sont des services (publics) d’intérêt général. Les citoyens sont en droit d’attendre qu’ils soient de grande qualité, abordables et universellement disponibles. A cet égard, il est très inquiétant de constater que la Commission ne reconnaît pas l’importance du financement public de ces secteurs et le besoin d’investissements publics pour y améliorer la qualité des services et promouvoir les emplois de qualité.
La CES insiste pour que l’accent soit mis sur la création d’emplois de qualité. Les partenaires sociaux à tous les niveaux ont un rôle essentiel à jouer pour développer les stratégies et établir les bonnes conditions qui permettront de réaliser le potentiel de création d’emplois des secteurs de croissance tels que définis dans le Paquet pour l’emploi. S’agissant des soins de santé et des services sociaux, il convient de saluer la reconnaissance du rôle des partenaires sociaux et des résultats du dialogue social sectoriel en matière de recrutement et de fidélisation et de recrutement transfrontalier éthique dans le secteur hospitalier.
{{Mobilisation des fonds de l’Union en faveur de la création d’emplois
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La CES se réjouit le l’orientation générale de la Commission en matière de mobilisation des fonds de l’Union en faveur de la création d’emplois. Nous soutenons cette approche visant à réaliser les objectifs du marché du travail. Toutefois, la CES estime que le Fonds social européen (FSE) doit être le principal instrument pour mettre en place la stratégie Europe 2020 dans le domaine de l’emploi, des politiques du marché du travail, de la mobilité, de l’éducation et de la formation et de l’inclusion sociale et que les quatre priorités pour l’utilisation du FSE doivent rester claires dans la réglementation. Le FSE doit également soutenir le développement du dialogue social, à savoir l’amélioration des capacités des partenaires sociaux. S’agissant de gouvernance, les partenaires sociaux européens saluent le nouveau « Code de conduite européen en matière de partenariat » qui devrait servir de directive pour la mise en place de réglementations portant sur les fonds structurels.
{{Rétablissement du dynamisme des marchés du travail
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Réformes du marché du travail : il existe de nombreux exemples d’entreprises qui, en collaboration avec les syndicats, ont réalisé des changements positifs et innovants en s’adaptant à un contexte économique global en mutation. Bien qu’il soit exact qu’au premier stade de la crise économique les partenaires sociaux ont accepté et mis en place des solutions efficaces visant à atténuer les effets de la récession dans l’intérêt des entreprises et des travailleurs, un aspect fondamental de telles approches négociées est que celles-ci ont été possibles dans les États membres ayant une tradition de dialogue social bien établie. Pour le mouvement syndical, cela démontre simplement l’intérêt de partenaires sociaux solides et d’un dialogue social et de négociations collectives qui fonctionnent.
La CES a prévenu que se concentrer sur un concept européen de flexicurité ne serait d’aucune aide mais la Commission a malgré tout cherché à réexaminer la question de la flexicurité dans le contexte et en réponse à la crise. En perpétuant l’agenda européen de flexicurité (avec la répétition de la référence à un « contrat unique à durée indéterminée » dans le document de travail des services qui l’accompagne), la Commission rate l’occasion de dire clairement que la flexicurité n’est pas la solution en temps de crise. Les marchés du travail en Europe présentent déjà un degré élevé de flexibilité mais la quête de toujours plus de flexibilité a débouché sur l’insécurité des travailleurs, souvent liée à l’augmentation de formes atypiques d’emploi. Il existe des éléments probants[[Not for bad weather: flexicurity challenged by the crisis, ETUI 3/2010, ISSN 2031-8782]] attestant de l’échec du concept de flexicurité à passer le test de la crise qui s’accompagne d’un accroissement rapide du chômage avec peu ou pas de sécurité correspondante, que ce soit sous forme d’avantages solides, d’accès accru à la formation ou des nécessaires politiques actives de l’emploi.
La Commission semble de plus faire marche arrière par rapport à la question de la sécurité du marché du travail en invoquant des « limites de temps » et une « conditionnalité accrue » pour les indemnités de chômage. Présenter comme « modernes » des réformes de la sécurité sociale ayant contribué à une explosion des inégalités et de la pauvreté est particulièrement hypocrite (voir la réforme Hartz en Allemagne), tout comme l’est l’affirmation que les États membres qui ont une faible protection tant en matière d’emploi que de sécurité sociale (les pays d’Europe centrale et orientale) forment un noyau de « flexicurité ».
Bien que la Commission recommande, malgré les contraintes budgétaires, que les États membres maintiennent les piliers de la flexicurité (par ex. la couverture des indemnités de chômage), la réalité est tout autre. La CES se demande si la Commission est vraiment capable de concilier la promotion de l’assainissement budgétaire avec l’agenda de la flexicurité. De plus, alors qu’il est généralement admis qu’un dialogue social fort est un élément nécessaire au succès de tout modèle de flexicurité authentique, nous observons actuellement, partout en Europe, une tendance à attaquer les négociations collectives et une réticence à renforcer la participation des travailleurs.
La CES réaffirme que la flexibilité du marché du travail ne crée pas davantage d’emplois mais transforme simplement les emplois existants en emplois et contrats précaires : « les mauvais emplois chassent les bons ». Cela ébranle en réalité la relance de l’économie car les travailleurs sous contrats flexibles et précaires sont moins payés et épargnent davantage à cause de l’insécurité à laquelle ils sont confrontés. Le travail précaire induit une relance plus faible et non pas plus vigoureuse. Comme la Communication le fait elle-même remarquer, durant la crise, les pertes d’emploi ont principalement affecté les travailleurs sous contrat à durée déterminée.
La CES trouve toutefois positif l’accent mis par la Commission sur les avantages potentiels de la flexibilité interne. La CES a demandé[[Résolution de la CES – Investir pour la croissance et l’emploi – Réaction de la CES à l’Examen annuel de la croissance 2012, http://www.etuc.org/a/9810]] une initiative au niveau européen, à développer avec la pleine participation des partenaires sociaux, visant à maintenir l’emploi, protéger les revenus et donner aux travailleurs l’occasion d’entretenir leurs compétences.
Segmentation des marchés du travail : la Commission constate avec raison le problème de la segmentation des marchés du travail et de l’usage excessif de contrats atypiques et d’emplois de faux indépendants mais la CES regrette l’absence d’équilibre dont elle fait preuve dans son approche pour résoudre cette question. Alors que la Commission considère toujours les dispositions législatives en matière de protection de l’emploi (EPL) comme étant un obstacle à la création d’emplois, la CES soutient que toute approche équilibrée doit reconnaître que le travail précaire est une conséquence des trop nombreuses failles dans le droit du travail permettant à certains employeurs d’affaiblir la stabilité des relations de travail et de retirer des avantages compétitifs indus par rapport à ceux qui cherchent à respecter la protection des travailleurs. Plutôt qu’une orientation générale visant à affaiblir les EPL, la Commission devrait s’attacher à combler ces failles et garantir un traitement égal à tous les travailleurs quelle que soit leur situation contractuelle et quel que soit leur genre.
Nous insistons sur la nécessité d’assurer que toute initiative prise dans le cadre du Paquet pour l’emploi soit adaptée afin de promouvoir l’égalité entre les hommes et les femmes de manière générale et, en particulier, d’aborder la question de l’écart salarial et de la ségrégation entre hommes et femmes sur le marché du travail.
Offrir des perspectives d’emplois aux jeunes : la CES a, à plusieurs reprises, souligné l’urgence de la situation concernant le chômage des jeunes tandis que, dans leur Programme de travail 2012-2014, les partenaires sociaux européens se sont engagés à négocier prioritairement un cadre d’actions en faveur de l’emploi des jeunes. Dans un contexte où la flexibilité est imposée de façon unilatérale aux jeunes travailleurs, l’accent doit d’abord et avant tout être mis sur la sécurité. La CES est convaincue qu’une approche considérant la « flexicurité » comme un facteur clé pour aborder la segmentation du marché du travail des jeunes est risquée et peu judicieuse. Il faut, au lieu de cela, promouvoir des politiques actives de l’emploi, mises en œuvre conjointement avec les partenaires sociaux, garantissant la création d’emplois de qualité et prévenant tout risque d’exclusion sociale ou de discrimination à l’encontre des jeunes.
La CES soutient l’idée d’une garantie pour les jeunes assurant que chaque jeune ait accès à une formation ou à un emploi dans un délai déterminé. Nous attendons avant fin 2012 la proposition de la Commission pour une recommandation du Conseil portant sur les garanties pour les jeunes. Il faut que des objectifs concrets soient définis dans ce cadre, par ex. une réduction du chômage des jeunes dans un laps de temps précis et une augmentation du budget de l’UE consacré à la lutte contre le chômage des jeunes ainsi que du FSE. La CES est également engagée vis-à-vis d’une « Charte européenne en matière de stages et d’apprentissage » et saluons la consultation de la Commission sur un Cadre de qualité pour les stages à laquelle nous répondrons séparément.
{{Renforcement du dialogue social et des négociations collectives
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Un dialogue social solide à tous les niveaux est un élément clé pour trouver des solutions adéquates aux problèmes du marché du travail et des lieux de travail et est aussi pertinent en temps de crise qu’à tout autre moment. L’accent mis par la Commission sur le renforcement du dialogue social est bienvenu et tombe à point nommé. La CES souligne la nécessité de soutenir et d’étendre les négociations collectives comme moyen de réduire les inégalités du marché du travail, garantir des emplois et des salaires décents, prévenir le dumping social et assurer une concurrence loyale. Des négociations collectives coordonnées représentent un moteur important pour relancer la demande globale et mettre en place un processus autonome de croissance économique. Cela implique et demande une approche nationale et sectorielle des négociations collectives en plus d’une action au niveau de l’entreprise.
Dans ce contexte, la CES réitère également sa demande pour que soit développé un cadre législatif général renforçant les règles en matière de participation des travailleurs et garantissant que toutes les formes juridiques d’entreprise existant au niveau européen soient soumises à des règlements contraignants sur la participation des travailleurs dans les conseils d’administration, sur l’information et la consultation ainsi que sur la présence de représentants des travailleurs dans les questions transfrontalières[[Résolution de la CES – La participation des travailleurs en danger: Vers une meilleure implication des travailleurs, http://www.etuc.org/a/9559]].
La Communication relève à raison que « les pays dont les marchés du travail ont davantage résisté à la crise se caractérisent par un dialogue social constructif ». Pourtant, les actions de la Troïka dans les États membres ayant fait l’objet d’un sauvetage financier et celles prises d’initiative par d’autres États membres sont en nette contradiction. La CES s’inquiète une nouvelle fois du fait que la crise économique serve d’excuse à de nombreux États membres pour ignorer les droits des syndicats et des travailleurs[[The crisis and national labour law reforms: a mapping exercise (La crise et les réformes du droit national du travail, exercice de mappage), ETUI Document de travail 2012.04]] et démanteler les structures et processus des relations du travail, sapant ainsi le dialogue social et les négociations collectives. La CES prévient que ces réformes pourraient enfreindre des règles et normes fondamentales de l’OIT, du Conseil de l’Europe et de l’Union européenne. La CES critique vivement la Commission pour n’avoir pas réagi plus vigoureusement aux mesures violant les droits fondamentaux tels que garantis par le Traité de l’UE et la Charte des droits fondamentaux. Nous demandons davantage de visibilité de la part de la Commission dans la promotion et la défense des droits syndicaux, en ce compris le droit de grève.
{{Investissement dans les compétences
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Il y a un large consensus parmi les responsables politiques et les partenaires sociaux quant au fait qu’investir dans l’éducation, la formation et les compétences des citoyens européens est une condition majeure de la prospérité en Europe. La CES approuve l’accent mis dans la Communication sur l’investissement dans les compétences, l’anticipation des besoins en compétences et sur le développement de l’apprentissage tout au long de la vie. La CES a précédemment plaidé pour un droit individuel à la formation. Bien que la Commission ait raison de soulever le problème de l’inadéquation des compétences, la CES s’inquiète de ce que la crise de l’emploi soit réduite à une question d’inadéquation ou de pénurie de compétences. L’alignement des compétences avec les besoins du marché du travail, l’amélioration de l’enseignement et de la formation professionnels (EFP) et la reconnaissance des compétences ne suffiront pas à créer de nouveaux et de bons emplois.
La CES souligne également que l’impact de la crise économique, de l’assainissement budgétaire et des réductions correspondantes des dépenses publiques ne doit être ni ignoré ni sous-estimé. Une politique réelle et efficace en matière d’apprentissage tout au long de la vie et d’EFP représentant une véritable valeur ajoutée pour le marché du travail ne sera possible que moyennant un financement approprié. Les fonds structurels peuvent largement y contribuer mais sont complémentaires, les États membres, les régions et les pouvoirs locaux devant apporter les moyens nécessaires pour soutenir cette politique.
La CES attire également l’attention sur le rôle de l’industrie et des partenaires sociaux dans ce domaine. Les principes de partenariat doivent être renforcés en précisant en outre que cela implique non seulement les employeurs et les acteurs d’EFP mais aussi les syndicats à tous les niveaux. La gestion directe par les syndicats de l’apprentissage tout au long de la vie et d’EFP au travers de leurs propres institutions, organes et représentants doit également être reconnue et soutenue. De plus, les entreprises doivent être encouragées à investir dans leur propre main-d’œuvre mais aussi dans la main-d’œuvre locale. Des mesures doivent être développées pour venir en aide aux PME en particulier, par exemple par la mise en commun de ressources pour garantir à leurs travailleurs l’accès à la formation continue. L’impact des pratiques d’entreprises, tels les processus de restructuration et de délocalisation, sur le maintien des compétences dans un secteur ou dans une région doit également être examiné.
Restructurations : à de nombreuses reprises, la CES a souligné le besoin d’un cadre juridique pour l’anticipation et la gestion du changement et des restructurations et plaidé pour une action de l’UE pour sa mise en place. Elle l’a une nouvelle fois fait dans sa réponse au Livre vert sur les restructurations[[Résolution de la CES – Anticipation du changement et restructurations : la CES demande à l’UE d’agir, 6-7 mars 2012, http://www.etuc.org/a/9818
]].
{{Vers un marché du travail européen
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La CES pense qu’un marché du travail européen doit reposer sur des « règles du jeu » européennes, associant frontières ouvertes et protection adéquate. Celles-ci doivent garantir : l’égalité de traitement entre travailleurs locaux et migrants ; une concurrence loyale en matière de rémunérations et de conditions de travail ; le respect des conventions collectives nationales et des systèmes nationaux de relations du travail ; l’égalité d’accès aux prestations sociales pour tous les travailleurs ainsi que les instruments et outils adéquats pour le contrôle et l’application des normes de travail.
Mobilité : la CES reste fermement attachée au principe de la libre circulation des travailleurs et pense que la mobilité volontaire doit être encouragée et facilitée. La mobilité doit toutefois être un droit et non une obligation et nous nous inquiétons donc de l’importance exagérée donnée à la mobilité géographique comme solution au chômage. La mobilité peut certes contribuer à améliorer les perspectives d’emploi d’une personne mais ne doit pas nuire aux investissements nécessaires à tous les niveaux pour le développement local, c’.-à-d. la création d’emplois là où vivent les gens, en particulier dans les régions qui connaissent un chômage élevé.
Nous nous félicitons de l’accent mis par la Commission sur les obstacles à la mobilité et à la libre circulation des travailleurs. Eliminer ces obstacles est principalement du ressort des États membres mais la Commission devrait faire des recommandations et coordonner les initiatives nationales et intergouvernementales. Nous regrettons cependant le manque d’insistance quant au besoin d’égalité de traitement, des obstacles que pose le dumping social et salarial et au besoin de garantir le respect du droit national en matière d’emploi et de travail et des systèmes nationaux de relations du travail. La CES répète que les propositions de la Commission concernant le règlement Monti II et l’application de la Directive sur le détachement des travailleurs ne résolvent pas ces problèmes[[Position de la CES sur la directive relative à l’exécution de la directive concernant le détachement des travailleurs, http://www.etuc.org/a/10038]].
La CES ne soutient pas la division de l’EURES (les services européens de l’emploi) entre le FSE et le nouveau Programme européen pour le changement social et l’innovation sociale. Le FSE devrait contribuer au moins en partie à l’activité d’EURES, notamment en matière de partenariats transfrontaliers, qui est fondamentale pour lever les obstacles à la mobilité et prévenir le dumping social dans les zones frontalières. De plus, la priorité à la mobilité dans l’utilisation du FSE devrait être obligatoire pour les États membres. Si EURES est néanmoins divisé en deux fonds, le Programme européen pour le changement social et l’innovation sociale devrait être un moyen accessoire destiné à soutenir le partenariat EURES transfrontalier conjointement avec le FSE. Pour atteindre cet objectif, le principe de partenariat et une contribution minimum doivent également être inclus dans le Programme[[La proposition de cadre financier pluriannuel et de politique de cohésion de l’UE pour la période 2014-2020 : position de la CES et appel à consultation, http://www.etuc.org/a/9511
]].
Migration : la Commission reconnaît la nécessité d’aborder la question de la migration et, bien que cette Communication ne contienne aucune proposition concrète, de nombreuses initiatives législatives ont été prises ces dernières années dans ce domaine. Un cadre juridique cohérent en matière de migration, qui tienne compte de la nécessité d’éviter une segmentation des droits entre les différentes catégories de migrants, combiné à une meilleure coordination des politiques en la matière est, selon la CES, nécessaire. Le fait que la Communication n’aborde pas les obstacles à la mobilité des travailleurs migrants en provenance de pays tiers est également une lacune importante.
{{Amélioration de la gouvernance de l’Union
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Coordination renforcée des politiques de l’emploi et économiques: la CES a déjà insisté sur la nécessité d’une gouvernance économique plus équilibrée et se félicite donc de la proposition d’équilibrer la nouvelle gouvernance économique en renforçant sa coordination avec les politiques sociales et de l’emploi. Cela est d’autant plus nécessaire si l’UE veut atteindre ses objectifs Europe 2020.
Les propositions pour élaborer un rapport d’évaluation comparative de l’emploi et un tableau de bord de l’application des plans nationaux pour l’emploi sont utiles. Ils devraient permettre un contrôle transparent des performances et des progrès en matière d’emploi par rapport à d’autres objectifs Europe 2020 comme la réduction de la pauvreté. Dans ce cadre, les partenaires sociaux européens devraient participer à la définition des critères d’évaluation et du tableau de bord.
Associer davantage les partenaires sociaux : il est essentiel d’associer les partenaires sociaux à l’élaboration et à la mise en œuvre des politiques économiques et de l’emploi. Les partenaires sociaux devraient en outre être consultés en temps utile avant la publication de l’Examen annuel de la croissance et pour les discussions traitant des « grandes priorités stratégiques » en matière de politiques de l’emploi plutôt qu’après qu’elles aient déjà été définies.
Selon la CES, mettre en place le contrôle des rémunérations au niveau européen ne peut se faire qu’aux conditions suivantes : l’autonomie des partenaires sociaux doit être strictement respectée ; les salaires ne peuvent être utilisés comme instrument d’ajustement concurrentiel ; le champ d’application doit être large et inclure des facteurs qualitatifs déterminants des positions concurrentielles au plan budgétaire et de la politique monétaire ; les bénéfices et leur utilisation doivent être surveillés.
Un dialogue macroéconomique amélioré et plus solide, comprenant notamment davantage d’échanges au niveau politique entre les partenaires sociaux européens et nationaux d’une part et tant les ministres de l’emploi que les ministres des finances d’autre part, est le forum qui convient et au travers duquel il faut organiser cette participation plus étroite des partenaires sociaux. C’est également le forum dans lequel les partenaires sociaux devraient participer à la procédure portant sur les déséquilibres macroéconomiques excessifs (tableau de bord, rapport sur le mécanisme d’alerte, analyses approfondies par pays).
Dans tout cela, les articles 153-5 TFUE, limitant la compétence de l’Union européenne en matière de rémunérations, et 152, faisant obligation à l’Union de respecter la diversité des systèmes nationaux de relations du travail et de formation des salaires, doivent être strictement pris en compte. Dans ce but, et dans le respect de l’autonomie des partenaires sociaux, toute discussion spécifique sur la dynamique salariale doit avoir lieu à un niveau bipartite entre les partenaires sociaux européens eux-mêmes, la Commission tenant le rôle de facilitateur de ce dialogue conformément aux articles 152 et 154 TFUE.