Bruxelles, 7-8/12/2006
Services postaux
Le 18 octobre 2006, la Commission européenne a déposé une proposition d'ouverture totale à la concurrence des services postaux européens à partir du 1er janvier 2009. Le but affiché est la suppression pure et simple des « monopoles postaux ». La question des modalités de financement est secondaire. Son résultat probable est que certains opérateurs seront contraints de dégrader l'offre et de réduire massivement leurs emplois, avec des conséquences négatives pour le développement régional ainsi que pour la cohésion économique et sociale.
La proposition va à l'encontre de ce qui devrait être les deux principaux objectifs d'une nouvelle directive postale :
1) Garantir des services postaux de haute qualité pour tous, indépendamment de l'endroit où l'on vit, à des prix abordables (tarifs uniformes).
Aujourd'hui, l'obligation universelle du service postal est remplie par « un secteur de services réservé » très limité (les lettres pesant 50g ou moins). La proposition de la Commission, si elle est adoptée, éliminera ce secteur de services réservé qui s'est avéré être le seul service fiable. La proposition n'offre pas d'autres solutions de financement envisageables en dehors d'une aide de l'État (les contribuables paieraient aujourd'hui pour quelque chose qui était auparavant gratuit), d'un subventionnement croisé (auquel la Commission s'est opposée pendant des décennies) ou de la création d'un « fonds de compensation » que les concurrents devraient payer (par le passé, tous les fonds de ce type ont échoué).
2) Créer un marché interne harmonisé pour les services postaux.
Si elle est adoptée, la proposition de la Commission créera un terrain de jeu inégal, avec différentes conditions de concurrence dans les différents pays, minimisant ainsi l'objectif de créer un marché intérieur unique pour les services postaux de l'UE.
La CES est particulièrement inquiète de l'impact de la proposition de la Commission sur l'emploi, à la fois au niveau du nombre et de la qualité des emplois. Des centaines de milliers d'emplois ont été perdus depuis le lancement de la libéralisation des services postaux européens. La raison principale (la seconde raison étant l'introduction de nouvelles technologies) a été l'ouverture du marché. Il est clair que cette politique crée des emplois instables avec de pauvres salaires et de mauvaises conditions de travail. Elle encourage le travail temporaire et à temps partiel ainsi que les contrats d'indépendant qui imposent des conditions qui ne permettent pas de vivre décemment.
À long terme, cela aura un impact grave et négatif sur l'Union européenne. La CES a souvent appelé à un moratoire sur la libéralisation et à une évaluation de son impact sur l'emploi et sur les travailleurs avant de poursuivre davantage cette politique. Il est contraire aux objectifs du modèle social européen de simplement remplacer les monopoles publics par des oligopoles privés, au lieu de créer « des emplois meilleurs et plus nombreux », et de remplacer les emplois sûrs par des emplois précaires et des heures de travail incompatibles avec l'objectif de conciliation de la vie professionnelle et de la vie familiale.
La CES a demandé à la Commission de rédiger une directive cadre sur les services d'intérêt (économique) général et de créer une sécurité juridique dans ces secteurs. À cette fin, elle a lancé une campagne en vue de collecter des signatures pour une pétition.
La CES recommande au Conseil des Ministres et au Parlement européen de ne pas adopter la proposition de la Commission pour une ouverture totale du marché en 2009, mais de plutôt inciter la Commission à avancer une proposition qui créerait un marché intérieur pour les services postaux profitable à tous et pas uniquement aux grandes entreprises postales et multinationales.
La CES soutient la campagne d'UNI Europa Poste au cours des étapes préparatoires des décisions du Conseil et du Parlement et coopérera étroitement avec UNI Europa.