La stratégie européenne en matière d'inclusion sociale

Bruxelles, 14 décembre 2001

Introduction

1. Il existe aujourd'hui un contexte juridique et politique qui confère des compétences au niveau européen en matière d'inclusion sociale. Le Conseil de Lisboa et ensuite le Conseil de Nice ont bâti les fondements d'une stratégie européenne à ce sujet, en articulant les niveaux national et européen, selon une méthode dénommée ‘méthode ouverte de coordination' (MOC). A l'instar du processus de Luxembourg en matière de politique européenne d'emploi, celui-ci requiert la formulation d'objectifs et d'indicateurs communs, l'élaboration de plans nationaux concrétisant les objectifs, l'évaluation et l'identification de meilleures pratiques. C'est ainsi que les indicateurs convenus d'un commun accord aident les Etats membres à savoir où ils en sont. En outre, ils peuvent apprendre de meilleures pratiques.
Les Etats ont une responsabilité particulière dans cette lutte pour l'inclusion sociale et contre la pauvreté. Ils sont mis sous pression afin de traduire cette conviction au maximum en une politique concrète.

La participation au processus européen d'inclusion sociale

2. La CES et ses organisations entendent participer à ce processus dans toutes ses phases, -c'est-à-dire en y incluant le suivi et l'évaluation, y compris le choix des indicateurs-, par le biais d'une réelle consultation et concertation, tant au niveau du Comité de Protection Sociale (CPS) pour ce qui est de la CES, qu'au niveau des instances appropriées en ce qui concerne ses organisations nationales.

3. Il existe une seconde forme de participation des partenaires sociaux (PS) à travers des conventions collectives. Celles-ci peuvent promouvoir la diversité sur le lieu de travail.. Elles peuvent par exemple, inclure l'accès à l'emploi et à la formation professionnelle des chômeurs de longue durée et des sans emploi mini-mexés ou touchant les minima sociaux. L'Etat peut alors encourager ces conventions collectives en offrant des mesures d'appui, ou à travers une législation introduisant des clauses sociales dans les marchés publics.

4. La CES réclame la mise en oeuvre de nouveaux moyens financiers, particulièrement au niveau national, ce qui conditionne la réussite de ces plans. Ces ressources nouvelles dégagées pour la mise en œuvre de ces plans ne doivent toutefois pas avoir pour conséquences la remise en cause des moyens financiers affectés aux régimes de protection sociale. Au niveau européen, les institutions viennent de se mettre d'accord, après une procédure de conciliation sur un programme communautaire de lutte contre la pauvreté pour une période de quatre ans et un budget de 75 millions d'€uros. Ce programme tend à appuyer des recherches et des échanges de bonnes pratiques ainsi que des réseaux européens en matière de lutte en faveur d'inclusion sociale. La CES veut souligner l'importance de la participation des acteurs des pays d'Europe centrale et Orientale à la mise en œuvre de ce programme et concrètement à la table ronde annuelle qui mesurera les progrès accomplis en la matière.

L'évaluation des mesures d'activation

5. La CES s'inscrit dans la démarche qui veut procurer un emploi aux exclus, plutôt que de les maintenir dans une dépendance fondée sur l'assistance. D'autre part la CES estime que cette démarche doit permettre de développer des emplois de qualité de telle sorte que l'on évite les phénomènes des "working poor". De tels emplois apporteront une réponse à des besoins de la société, aujourd'hui non satisfaits, et contribueront ainsi à l'amélioration de la qualité de la vie.

6. Toutefois, la CES et ses organisations seront attentives à ce que les mesures d'activation qui sont plus des mesures plus spécifiques que générales, ne soient pas un prétexte à une remise en cause des normes de travail existantes ni n'aient des effets indirects d'éviction du marché. C'est pourquoi elle invite ses organisations à s'impliquer et à être particulièrement vigilantes dans les propositions faites et dans le suivi et le contrôle de leur mise en œuvre. Notamment ces mesures devraient être évalués sur les critères suivants :

- l'effectivité: Combien de personnes ont effectivement trouvé un emploi ? Quel type d'emploi ? Ceux-ci correspondent-ils à un besoin sociétal ?;
- les effets possibles d'éviction (même si dans une certaine mesure, c'est inévitable) ;
- le respect du droit du travail, des salaires et des conventions collectives ;
- l'évaluation des conséquences de ces mesures sur les droits à la sécurité sociale .

La cohérence entre le processus européen d'inclusion et d'emploi

7. Si la CES estime que les plans d'inclusion sociale ont contribué à la visibilité des problèmes et mesures en faveur des groupes vulnérables ainsi qu'à la nécessaire coordination des services et acteurs, elle plaide pour une cohérence entre les mesures des plans d'emploi et ceux d'inclusion sociale, ainsi que dans le suivi et l'évaluation. C'est ainsi que certains indicateurs de qualité de l'emploi devront être confrontés avec des indicateurs d'inclusion sociale.

L'accès aux ressources

8. La CES refuse tout arbitrage entre les mesures d'activation et les prestations de protection sociale et d'assistance. Elle demande que les prochains plans d'inclusion sociale attache plus d'importance à une définition de revenu minimum, au nombre de bénéficiaires, à ceux et celles qui ne jouissent pas de leur droit au revenu minimum, et en particulier aux jeunes et aux personnes âgées.

Prévenir les risques

9. La CES attire l'attention sur le fait que la protection sociale et en particulier la sécurité sociale est un moyen efficace de prévenir l'exclusion sociale. Pour les prochains plans, elle demande des mesures renforçant la couverture des risques de ceux et celles exerçant des emplois aux contrats atypiques. Une visibilité des droits de ces travailleur(se)s, selon les différentes branches de la sécurité sociale, contribuera à clarifier leur situation.

Les indicateurs

10. La CES demande que soient élaborés des indicateurs comparables, qui permettent d'évaluer les politiques d'inclusion sociale et dont l'élaboration et l'évaluation impliquent tous les partenaires concernés et en particulier les organisations syndicales. Cette évaluation peut entraîner une révision des mesures, laquelle à son tour contribue à une efficacité dans l'éradication de la pauvreté.

Pour la CES, les indicateurs suivants, à combiner avec ceux sur la qualité de l'emploi, sont impératifs:

- le taux de pauvreté avant et après transferts sociaux ;
- le pourcentage de travailleurs et de retraités pauvres ;
- le pourcentage des contrats de travail en fonction de leur durée ;
- le taux de temps partiel long et court et la couverture des risques.

En outre, ces indicateurs doivent être intégrés dans l'exercice annuel de révision de la stratégie de Lisboa.

La dimension de genre

11. La CES veut attirer l'attention sur la situation :
a. des femmes âgées et la nécessité d'une pension minimale adéquate
b. la gratuité des services d'accueil de l'enfance pour les familles monoparentales aux bas revenus
c. des formations adaptées aux femmes migrantes

Les Pays d'Europe Centrale et Orientale

12. Le Conseil de Goteborg demande aux pays de l'élargissement de faire le même exercice d'inclusion sociale.

La CES et ses organisations revendiquent l'implication des organisations syndicales de ces pays dans les apprentissages mutuels et plus particulièrement à la mise en œuvre du programme européen de lutte contre la pauvreté et que les mêmes formes de concertation que celles mises en œuvre dans le cadre de l'Union Européenne se déroulent dans les Pays d'Europe Centrale et Orientale.

L'e-inclusion

13. Pour la CES, l'accès aux nouvelles technologies de l'information peut jouer un rôle important dans la lutte pour l'inclusion, en particulier en matière d'accès à l'emploi (e.a. pour certaines catégories de personnes handicapées) ou à un réseau social via le courrier électronique ou Internet. Pour la CES, ces nouvelles technologies qui représentent un outil parmi d'autres, ne sont cependant pas considérées comme une clé magique qui ‘intègrerait' les exclus. En tout état de cause, pour que ce soit un outil efficace au service de l'inclusion, la CES revendique que des mesures soient mises en œuvre visant les conditions d'accès et les modes d'apprentissage pour les publics les plus désavantagés.