Position de la CES: Doter les travailleurs des compétences nécessaires pour la transition écologique

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Doter les travailleurs des compétences nécessaires pour la transition écologique

Position de la CES adoptée au Comité exécutif des 16-17 mars 2022

Contexte

Le 1er juillet 2020, la Commission européenne a publié la stratégie européenne en matière de compétences, axée sur le perfectionnement et la reconversion professionnels en vue des transitions écologique et numérique du marché du travail.

La Commission européenne a présenté une proposition pour une recommandation du conseil sur l’apprentissage au service de la durabilité environnementale le 14 janvier 2022 à la suite d’une consultation publique qui s’est déroulée en deux étapes au cours de l’année 2021. Cette recommandation du Conseil traite de l’apprentissage de la sensibilisation à l’environnement et de la durabilité pour tous, tandis que la proposition de la Commission pour une recommandation du Conseil visant à assurer une transition équitable vers la neutralité climatique, présentée le 14 décembre 2021, porte également sur le développement des compétences des travailleurs dans le cadre de la transition écologique. Les ministres des Affaires sociales de l’UE se sont rencontrés le 15 février 2022 pour discuter des compétences nécessaires aux jeunes comme aux adultes pour répondre aux défis de la transition écologique et numérique.

La position suivante inclut l’opinion des syndicats sur la politique de la Commission européenne et résume l’avis de la CES sur le fait de doter les travailleurs des compétences nécessaires pour la transition écologique.                                                                                  

Il n’y a pas d’emplois sur une planète morte. La réduction rapide des émissions de gaz à effet de serre dans l’Union constitue donc une priorité absolue pour les syndicats européens. Il est indispensable pour l’Europe d’atteindre les objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre si elle entend honorer concrètement les engagements qu’elle a pris en vertu de l’Accord de Paris. Toutefois, afin d’atteindre ces objectifs, les politiques climatiques doivent être socialement équitables. Malheureusement, le pacte vert pour l’Europe ne s’accompagne pas encore de politiques sociales équivalentes qui rendraient cette transition équitable, conformément à l'introduction du socle européen des droits sociaux et à la Déclaration de Porto. Nous reconnaissons que la proposition pour une recommandation du Conseil sur l’apprentissage de la durabilité environnementale et la proposition de la Commission pour une recommandation du Conseil visant à assurer une transition équitable vers la neutralité climatique s’efforcent de s’appuyer sur ces politiques.

La crise du COVID-19 a touché tout le monde, transformé les modes de travail et renforcé la sensibilisation aux changements climatiques (par exemple, en modifiant la consommation, le transport et le travail). Comme un récent avis du CESE[1] nous le rappelle, tout le monde doit disposer des connaissances et des informations nécessaires sur l’environnement durable afin de lutter efficacement contre les changements climatiques et de s’y adapter. De même, nous avons tous besoin d’en saisir et d’en anticiper les effets escomptés, comme les inondations, les incendies de forêt, les vagues de chaleur et les phénomènes météorologiques extrêmes[2].

Les politiques climatiques auront un impact profond sur les travailleurs et nécessiteront leur formation, leur perfectionnement et leur reconversion. Cette transition devrait être utilisée comme une opportunité pour créer des emplois de qualité, accompagnés de bonnes conditions de travail dans tous les secteurs et toutes les régions. Il est nécessaire d’envisager le perfectionnement et la reconversion professionnel des travailleurs comme une responsabilité socio-économique. Le rôle des employeurs est donc essentiel pour permettre aux travailleurs d’accéder à la formation. L’accès à la formation devrait être garanti aux travailleurs, quel que soit leur contrat de travail, dans tous les secteurs, toutes les régions d’Europe et toutes les sociétés, toutes tailles confondues. Souvent, les travailleurs à temps partiel et sous contrat de courte durée, en majorité des femmes, des jeunes, des migrants, des entrepreneurs individuels et des travailleurs peu qualifiés, disposent d'un accès limité à la formation. Une attention particulière devrait être accordée à ces personnes et aux groupes les plus vulnérables dans les stratégies de compétences. Nous craignons que les nouvelles initiatives de l’UE sur les comptes individuels de formation et les micro-certificats ne laissent le développement des compétences de travailleurs à la seule charge de ces derniers, dont l’évolution des emplois est influencée par des politiques climatiques déconnectées de leurs conséquences sociales.

D’après le Cedefop[3], 46,1 % de la population adulte, soit environ 128 millions d’adultes en Europe, a besoin d’un perfectionnement et d’une reconversion[4]. La formation des employés est essentielle dans les politiques d’atténuation des changements climatiques et les travailleurs des secteurs qui seront les plus touchés ont besoin d’un soutien efficace pour accéder à la formation ainsi qu’à des programmes de perfectionnement et de reconversion professionnels. Nous nous réjouissons que la proposition pour une recommandation du Conseil sur l’apprentissage au service de la durabilité environnementale aborde également l’enseignement professionnel et la formation professionnelle (EFP) et l'éducation des adultes, mais nous regrettons qu’elle ne traite pas de la formation des employés et des besoins des travailleurs dans le cadre de la transition écologique des industries.

Les stratégies en matière de compétences ne peuvent être séparées de la création d’emplois de qualité et de stratégies de rétention. En effet, les programmes de formation, de perfectionnement et de reconversion professionnels ne seront d’aucune utilité pour les travailleurs s’ils vivent dans une zone économiquement déserte qui n’offre pas d’autres possibilités d’emploi. Les travailleurs ont besoin de nouveaux emplois de qualité dans ces mêmes régions où les effets de la transition se feront sentir. À cet effet, l’Union européenne et ses États membres devraient développer des politiques industrielles adéquates pour maintenir les emplois tout en évitant les fuites de carbone, et réussir à relocaliser les activités industrielles en Europe.  

L’importance du développement des compétences dans l’atténuation et l’adaptation aux changements climatiques, ainsi que dans l’économie circulaire

Pour parler des compétences en matière d’emplois dans des régions et des secteurs touchés par la transition écologique, nous devons aborder la question des besoins en compétences de manière concrète et dépasser le prisme étroit des compétences numériques et fondamentales. Les changements de compétences dans l’économie devront correspondre aux changements à venir induits par les politiques d’atténuation et d’adaptation ainsi que par le passage à une économie circulaire. Ces politiques auront des effets variés sur différents segments de la main-d’œuvre, ce qui signifie que nous devons adopter des approches singularisées et ciblées pour relever ces défis.

En matière d'atténuation, conformément à sa législation sur le climat, l'UE doit atteindre la neutralité climatique d'ici 2050. L'agenda climatique, à commencer par la mise en œuvre du "paquet Fit for 55", accélérera massivement la transformation du monde du travail. D'un point de vue quantitatif, le paquet "Fit for 55" pourrait avoir un impact global sur l’emploi (équivalant à une perte de 494 000 emplois d'ici à 2030 ou à la création possible de 110 000 emplois au total), qui dissimule cependant d’importantes variations d’un secteur et d’une région à l’autre[5]. Les travailleurs directement concernés ont besoin d'un soutien pendant la période de transition pour être requalifiés et accompagnés. Le défi des compétences dans la décennie à venir est énorme mais il est surmontable dès lors que les politiques adéquates sont mises en place. Nous pensons qu'il est nécessaire de prendre en compte les disparités régionales et locales et non les seules données globales et de soutenir les régions les plus impactées.

Les stratégies d’adaptation[6] aux changements climatiques que nous connaissons déjà toucheront également de nombreux secteurs sur le plan de l’organisation du travail, des besoins en compétences, de la capacité d'investissement et de l’emploi (augmentation du stress thermique, des inondations, des vagues de chaleur, des incendies de forêt, de la sécheresse, etc.). De nombreux secteurs nécessiteront de la part de leurs travailleurs une adaptation des compétences et des formations afin de faire face à ces changements[7]. À cet effet, il sera nécessaire d’élaborer des politiques efficaces de prévision des compétences et de mise à jour des profils professionnels et de travail, en faisant participer les syndicats aux décisions.

Le passage à une économie circulaire nécessitera également le perfectionnement/la formation des travailleurs. D’après le dernier projet conjoint des partenaires sociaux de l’UE[8], l’impact sur l’emploi du passage à l’économie circulaire varierait largement selon les secteurs : la gestion des déchets, la réparation, l’entretien, le recyclage, la refabrication et la réutilisation figureraient parmi les plus avantagés tandis les industries extractives, les métaux de base, les matériaux et les produits chimiques principaux, ainsi que certains biens durables en ressentiraient les effets négatifs. Le projet conjoint des partenaires sociaux de l’UE souligne que le passage à une économie circulaire devrait nécessiter un renforcement des compétences des travailleurs, car ceux-ci doivent s’adapter à l’utilisation de matériaux recyclés. Dans le même temps, le passage à l'économie circulaire entraînera probablement aussi une augmentation de la demande de qualifications de niveau intermédiaire - principalement dans le domaine de la réparation et de la maintenance - qui pourrait contribuer à atténuer les tendances actuelles de dualisation sur le marché du travail. Plus généralement, une réflexion circulaire devra être appliquée dans chaque secteur, industrie, profession et programme éducatif. L’économie circulaire doit être « intégrée à tous les niveaux d’enseignement, car la nature évolutive de plusieurs emplois nécessitera des connaissances sur le mode d’application des principes circulaires tels que l’utilisation rationnelle des ressources, le savoir-faire concernant les nouveaux matériaux ou les nouveaux modèles de services dans différentes professions, ainsi que les compétences numériques[9]. »

Pour réussir cette transition, l’anticipation des besoins en compétences sera primordiale. La confiance dans les travailleurs et la confiance des employés dans le processus seront également essentielles. À cet égard, le perfectionnement professionnel des travailleurs pour les conserver dans la même entreprise constitue la mesure la plus rassurante pour ces derniers. Il est également essentiel pour les entreprises de veiller à ce que les compétences acquises ne se perdent pas. Lorsque cela s’avère impossible dans la même société et qu’une transition d’un emploi à un autre est nécessaire, il est indispensable de conserver les travailleurs dans le même secteur et de leur donner le temps de se reconvertir sans subir de pertes financières.  Il convient également de s'assurer que les travailleurs peuvent trouver d'autres opportunités d'emploi dans les mêmes régions que celles où ils sont actifs aujourd'hui, afin de ne pas compromettre le soutien des communautés à la nécessaire transition vers une économie décarbonée. La formation inclusive des employés sera également un élément clé du succès de la transition verte. En effet, l'implication des employés dans le développement des plans de formation permettra d'anticiper correctement les besoins en compétences. Cela conduira aussi probablement à plus d'innovation vers des technologies propres et des processus d'économie circulaire, car les travailleurs sont des acteurs actifs de l'innovation sur le terrain dans les entreprises et les secteurs.

La stratégie européenne de décarbonisation doit reposer sur une coordination et une planification cohérente des politiques. Il est donc primordial de lier étroitement la stratégie industrielle de l’UE et les politiques européennes relatives aux compétences. Ceci devrait amener à un renforcement de la coordination, également au niveau national. Les travailleurs ont besoin de savoir comment leur emploi va évoluer et quels types de nouveaux emplois seront créés. Nous prenons acte de la proposition de la Commission visant à la cocréation de parcours de transition pour les 14 écosystèmes industriels identifiés dans la Stratégie industrielle pour l'Europe et soulignons le rôle important joué par les partenaires sociaux à cet égard, notamment lorsqu'il s'agit d'identifier les besoins de formation et de développer une stratégie en matière de compétences.

L’importance du développement des compétences dans la transition équitable

Afin de soutenir les régions et les secteurs les plus touchés, il convient d’étendre le concept de transition juste à l’ensemble des politiques européennes, notamment les stratégies de compétences. La décarbonisation doit conduire au maintien et à la création d‘emplois durables et de qualité dans tous les secteurs et toutes les régions.  Cela est nécessaire pour éviter la montée des inégalités entre régions et assurer une cohésion et un nivellement par le haut.

Dans le contexte des politiques en matière de compétences, une transition équitable signifie :

Des évaluations rigoureuses des impacts socio-économiques et des stratégies détaillées en matière de transition équitable afin d’anticiper les changements et de créer des opportunités d’emploi alternatives dans les régions et les secteurs qui seront touchés par ces changements. La CES demande qu’une analyse plus poussée soit menée concernant les effets sur l’emploi et les compétences au niveau des régions et des secteurs, à l’appui de stratégies régionales sur mesure visant à favoriser une transition des travailleurs entre les emplois.

Garantir le droit des employés à la formation, à la reconversion et au perfectionnement, ainsi que des politiques d'intervention directe sur le marché du travail pour garantir que les travailleurs sont dotés des nouvelles compétences requises. Il est indispensable de sensibiliser tous les adultes à la durabilité environnementale, et les pays de l’Union devraient renforcer leurs stratégies d’éducation des adultes et le financement de ces stratégies. L'introduction du 1er principe du socle européen des droits sociaux est essentielle pour garantir le droit d’accès de tous les travailleurs à des formations professionnelles, efficaces et inclusives aux compétences et aux aptitudes requises en vue de la transition écologique. Un meilleur accès aux formations professionnelles pour tous les travailleurs, quel que soit leur contrat de travail, doit être garanti par les entreprises dans le cadre des conventions collectives. Il est indispensable de garantir que les formations professionnelles, efficaces et inclusives débouchent sur des emplois de qualité, des conditions de travail décentes et une transition équitable. Afin d’accompagner les adultes et les travailleurs peu qualifiés dans le cadre de la transition écologique, l'introduction effective de la recommandation du Conseil de l’Union relative à des « parcours de renforcement des compétences » est de la plus haute importance.

La validation des compétences des travailleurs acquises au quotidien est essentielle pour faire en sorte que leurs compétences soient bien reconnues dans de nouveaux emplois dotés de bonnes conditions de travail. Valider leurs compétences et leurs aptitudes, leur fournir des services d’orientation et de conseil de qualité, leur garantir l’accès à des congés de formation rémunérés ainsi qu’à des qualifications complètes sont essentiels pour favoriser une transition équitable. À cet égard, la CES s'inquiète[10] du fait que seuls sept pays de l’Union disposent d’une ligne du budget national réservée à la validation, tandis que d’autres adoptent une approche décentralisée et mènent des projets à court terme à cet égard. Pour que les processus de validation soient accessibles pour tous et pleinement inclusifs, ils doivent être gratuits et relever d'institutions publiques.

Un Dialogue social et une négociation collective efficaces pour assurer une forte participation des travailleurs à toutes les étapes du processus, notamment en adaptant les stratégies en matière de compétences, les fonds de formation, l’accès à la formation et aux qualifications, ainsi qu’en organisant la formation et l'EFP. La transition entre les emplois est nécessaire pour assurer une transition en douceur pour les travailleurs et éviter les périodes de chômage. La protection sociale relève de la responsabilité collective de l’ensemble des intervenants, partenaires sociaux, autorités locales, prestataires de services en matière d’éducation et d’EFP et des services publics pour l’emploi ; elle devrait donc être assurée par le dialogue social. Nous demandons que les syndicats soient impliqués dans la gouvernance à l’échelon européen et national sur les stratégies en matière de compétences pour l’économie verte et dans l’élaboration de « principes et d’un langage communs sur la durabilité », qui constitue l’une des actions prévues dans l'initiative lancée par la Commission dans le cadre de la recommandation du Conseil sur l’apprentissage de la durabilité environnementale. Le dialogue social avec les syndicats au niveau des sociétés et des secteurs d’activité et au niveau national est indispensable pour garantir la bonne mise en œuvre de cette initiative politique. Les partenaires sociaux jouent un rôle clé en définissant les besoins en compétences, en mettant à jour les profils de qualification et en fournissant des services d’orientation aux travailleurs. Il est également important de fournir aux syndicats des moyens pour former leurs représentants aux transitions écologiques et orienter les travailleurs vers l’accès à la formation aux compétences et aux procédures de validation.

Nous apprécions le fait que la recommandation du Conseil visant à assurer une transition équitable vers la neutralité climatique souligne la nécessité d’impliquer les travailleurs  dans le développement et dans l'introduction de stratégies nationales en matière de compétences.. Nous regrettons cependant que la recommandation du Conseil n’ait aucun effet immédiat sur les États membres car il ne s’agit que d’un droit souple. Nous regrettons également que la recommandation du Conseil ne favorise pas plus le renforcement des systèmes de négociation collective et l’extension de la couverture à l’ensemble de l’Europe.

Les transitions équitables devraient être également soutenues par des moyens financiers suffisants. L'initiative de l’UE devrait demander aux États membres de garantir un budget public durable destiné à soutenir le volet de l’éducation des adultes consacré à la responsabilité environnementale, la validation de l’apprentissage informel et non formel et les services d’orientation et de conseil. Ceci devrait être contrôlé par le Semestre européen et le tableau de bord social. La CES se réjouit de constater que la recommandation du Conseil demande aux pays de l’UE d’utiliser les FRR et les autres outils financiers de l’UE (FSE+, Erasmus, FEDER, recettes tirées des mises aux enchères des quotas d’émission[11], etc.) afin de soutenir l’éducation relative à l’environnement. Toutefois, ces outils sont également importants pour assurer l’accès des travailleurs au développement des compétences en vue de la transition écologique des industries qui mènent à des emplois de qualité dotés de bonnes conditions de travail et les partenaires sociaux devraient être impliqués dans l’attribution des fonds destinés aux besoins en compétences.

Demandes supplémentaires de la CES en vue de doter les travailleurs des compétences nécessaires pour la transition écologique

Nous soulignons l’importance du respect de la compétence nationale en ce qui concerne l’amélioration des systèmes d’EFP et d’éducation des adultes, la réglementation sur la définition des exigences de qualification et sur l’exercice de professions favorisant la transition écologique. L’accès à une qualification complète doit constituer un droit pour tous les adultes et les travailleurs, fondé sur des formations validées et certifiées, des compétences écologiques et une sensibilisation à l’environnement. En référence à la recommandation du Conseil sur l’apprentissage de la durabilité environnementale, nous rappelons que les syndicats sont en faveur des micro-certificats que lorsqu’ils sont complémentaires aux qualifications complètes, que leur qualité est garantie et certifiée, qu’ils sont reconnus comme une attestation de réussite et non pas uniquement validés et qu'ils jouent un rôle dans la validation de l’apprentissage non formel et informel (ANFI).

Le pacte vert pour l’Europe a annoncé que la Commission européenne préparerait un « cadre de compétences européen pour contribuer au développement et à l’évaluation des connaissances, des compétences et des attitudes en matière de changement climatique et de développement durable. » Nous regrettons que la recommandation du Conseil sur l’apprentissage de la durabilité environnementale ne se concentre pas concrètement sur l’enseignement et la formation professionnels ainsi que sur l’éducation des adultes. De même, elle ne suggère aucune solution pour que les travailleurs et les demandeurs d’emploi aient accès à des formations professionnelles, de qualité et inclusives qui pourraient les aider à acquérir les compétences nécessaires pour la transition écologique. Nous soulignons que le perfectionnement et la reconversion relèvent d’une responsabilité socio-économique et non individuelle. Par conséquent, les travailleurs ne devraient pas être laissés seuls pour trouver et financer des formations sur les compétences pour les transitions écologiques des industries. La recommandation du Conseil devrait souligner davantage l’obligation pour les gouvernements et des sociétés de garantir de formations concrètes, efficaces et inclusives pour des emplois de qualité et une transition équitable pour les travailleurs.

Il est nécessaire de lier la préparation des travailleurs à la transition écologique au droit à des congés de formation rémunérés, qui doivent permettre aux travailleurs de subsister lorsqu’ils participent à des programmes d’études ou à des cours de développement de carrière en lien avec de nouveaux emplois verts et pour leur propre intérêt afin qu'ils soient davantage sensibilisés aux changements environnementaux et au développement durable.

Dans le cadre de cette initiative, il est indispensable de mettre en place une veille stratégique sur les besoins en compétences afin de prévoir les besoins en compétences pour les nouveaux emplois et tâches et pour établir un lien avec des stratégies efficaces en matière d’industrie et de compétences. Les partenaires sociaux et les services publics de l’emploi (SPE) doivent être impliqués dans la prévision des besoins en compétences et dans leur mise en correspondance avec les offres d’emploi et de formation destinées aux travailleurs. Nous nous réjouissons de constater que les deux recommandations du Conseil mettent l’accent sur l’importance de la prévision des compétences. La Commission devrait mettre en place d’ici 2030 un indicateur/indice annuel du nombre d’adultes et d’employés participant à des formations en matière de compétences écologiques, de sensibilisation aux compétences écologiques et à l’environnement et de responsabilité. On pourrait suivre en cela l’exemple de la stratégie européenne en matière de compétences qui a mis en place un indice sur la participation à des formations numériques.

Nous soulignons l’importance de l’ajustement des programmes d’apprentissage aux compétences nécessaires dans le cadre de la transition écologique. En faisant référence à la proposition de la Commission pour une recommandation du Conseil visant à assurer une transition équitable vers la neutralité climatique, nous voudrions souligner que l'introduction de la recommandation du Conseil relative à un cadre européen pour un apprentissage efficace et de qualité devrait être renforcée afin de garantir un apprentissage de qualité supérieure, inclusif, équitable et rémunéré pour tous et afin que les compétences fournies aux apprentis incluent la responsabilité environnementale et la sensibilisation aux enjeux climatiques.


[1] Comité économique et social européen : Vers une stratégie européenne visant à renforcer les aptitudes et les compétences vertes pour tous (avis d'initiative), 2020

[2] CESE : Vers une stratégie européenne visant à renforcer les aptitudes et les compétences vertes pour tous, 2020

[3] CEDEFOP : Responsabiliser les adultes à travers des parcours de renforcement des compétences et de reconversion. Tome 1 : population adulte susceptible de bénéficier d’un perfectionnement et d’une reconversion, 02/2020

[4] Sur le plan sectoriel, 1,5 million de nouveaux emplois devraient être créés dans le secteur de l’énergie, 1,1 million d’emplois dans le secteur de la construction et 100 000 dans le secteur agricole, tandis qu’environ 150 000 pertes d’emploi sont attendues dans le secteur automobile.  Source : McKinsey : Parcours pour une décarbonisation neutre en Europe et implications socio-économiques, 2020

[5] Document de travail des services de la Commission, Étude d’impact « Intensifier l'ambition climatique de l'Europe pour 2030 en investissant dans un futur climatiquement neutre pour le bien de nos peuples ».

[6] CES, 2020, Guide pour les syndicats - adaptation aux changements climatiques et au monde du travail ; projet de la CES sur l’adaptation et le monde du travail ; Résolution de la CES : Une nouvelle adaptation européenne à la stratégie de lutte contre les changements climatiques pour le monde du travail

[7] OIT : Emplois et compétences sur la voie de la transition écologique, 2010

[8] Rapport définitif du PROJET EUROPÉEN DES PARTENAIRES SOCIAUX SUR L’ÉCONOMIE CIRCULAIRE ET LE MONDE DU TRAVAIL

[9]  Rapport de Sitra : Comment l’économie circulaire modifie l’emploi en Europe, mars 2021

[10] Position de la CES en matière de renforcement de la validation de l’apprentissage non formel et informel, 2021

[11] Le système d’échange de quotas d’émission (SEQE) « Directive 2018/410 du 14 mars 2018  modifiant la directive 2003/87/CE afin de renforcer le rapport coût-efficacité des réductions d’émissions et de favoriser les investissements à faible intensité de carbone, et la décision (UE) 2015/1814” prévoit que les États membres devraient affecter au moins 50 % des recettes tirées des mises aux enchères ou de l’équivalent en valeur financière à des projets climatiques et énergétiques.